Reportage Campo : entretien avec Clément Dubecq « Clemente »

« Relancer ma carrière, la reconstruire… »

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Entretien et photos : Thierry Rippol (Toreria.net pour vuelta)

Clément Dubecq est né en février 1995 dans la préfecture de la Gironde, mais bien vite il emprunta la voie romaine qui reliait Bordeaux à Pamplona pour s’arrêter à Pouillon, un ancien vicus gallo-romain au cœur de la Chalosse, berceau de sa famille maternelle. C’est là que le virus des toros l’a contaminé ingéré par son père, grand aficionado, mais c’est à Nîmes auprès d’H. Galtier et des aficionados practicos qu’il a appris les rudiments de son métier, après des premiers pas à l’école taurine d’Hagetmau tenue par Béatrice Brethes, débutant dans le Sud-est un parcours ou les aléas et les complications ne l’ont guère épargné. Aujourd’hui il redémarre une nouvelle carrière depuis Nîmes et avec l’appui de son mentor de longue date, l’ancien banderillero arlésien Fermin Gonzalez… Nous l’avons suivi, lors d’une tienta chez Fano et quelques jours plus tard lorsqu’il tua deux toros de Jacques Giraud, à puerta cerrada, porte hermétique au Covid….

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-“Aujourd’hui, il me faut relancer ma carrière, surtout après l’arrêt brutal qui a suivi mon alternative et là je suis en pleine reconstruction…” 

C’est par l’intermédiaire d’H Galtier qu’il rencontrera F. Gonzalez pour former un binôme qui tient encore aujourd’hui et grâce à ses conseils il débutera en novillada sans picadors à Garlin en 2011… Il débute en novillada piquée le 2 juin 2013 à Captieux en coupant trois oreilles à des novillos de Vicente Ruiz et l’année suivante il fera 21 paseillos grâce à l’arrivée de Carlos Zuñiga qui décida de l’apoderer après son triomphe à Arnedo… année qui vit la naissance de sa peña taurine à Nîmes… 2015 Madrid trois fois, Séville et le 29 juin 2016 à Zamora l’alternative lors d’une corrida de la feria de San Pedro ou il sortira en triomphe avec Cayetano son parrain après avoir coupé deux fois une oreille à des toros de Sanchez Arjona….Il devient le 60eme matador de toros français. Deux corridas plus tard, le père et le fils Zuñiga se sont fâchés et pour conséquence une descente aux enfers pour le torero français délaissé ! Et en 2018, il se retrouve tout seul et sans contrat, El Boni, qui devait prendre la suite en restera à l’effet d’annonce.

“ En 2019, j’ai toréé à Saint-Sever aux côtés de Sébastien Castella et Thomas Dufau, devant des toros de Victoriano del Río. Ça s’est très bien passé et l’on a recommencé à parler de moi, en France… Il faut dire que depuis cinq ans, je vivais en Espagne, je toréais en Espagne, je tientais dans des ganaderias espagnoles. Et là je réapparais”

Mais c’était sans compter avec la Covid….

-“ Du coup 2020 sera une année blanche comme pour la plupart d’entre nous, mais j’en ai tiré un côté positif. Je me suis senti soutenu et faisant beaucoup de campo, j’ai pu retrouver des sensations, trouver un rythme pour toréer qui me correspond plus…”

Mais c’était sans compter sur une grave blessure en octobre lors d’une fiesta campera dans la Dehesa El Encinar à Villárdiga (Zamora) à la ganaderia de Hermanos Boyano de Paz, prit par le second toro avec fracture du sternum, lui empêchant d’honorer un poste à Gamarde le mois d’après…

-“Je vis maintenant à Nîmes mais avec cette blessure je n’ai rien pu faire de tout ce long hiver, je reprends juste la cape et la muleta et je viens à peine de me mettre devant des animaux… Je manque encore de rythme mais je suis désireux de toréer, d’y prendre du plaisir…”

Pour 2021, ça s’annonce encore compliqué…

-“En effet, la situation sanitaire actuelle ne permet pas de dire s’il y aura des corridas cette année, du moins pendant le premier semestre. Tous les organisateurs essayent de trouver des plans mais rien n’est encore vraiment arrêté. C’est très compliqué pour tous et moi je ne peux pas dire que j’ai une corrida de signer… j’attends et j’espère et surtout je me prépare comme si je devais toréer demain…”

Lors du tentadero chez Juliette et Christophe Fano, il retrouva H. Galtier qui accompagnait Solalito…

-“Solal représente un peu le même cas que moi, il y treize ans, j’avais alors treize ans. Depuis nos chemins se sont séparés mais c’est très bien qu’il soit encore là pour aider un jeune novillero, surtout dans la situation actuelle, pesante et incertaine pour tous les toreros. D’un autre coté il y a une réelle solidarité entre nous, c’est très bien et même les ganaderos français jouent le jeu…”

Fermin Gonzalez, originaire d’Algemesi, fut un novillero “ arlésien” des années 80, au toreo épuré et artistique, qui refusa de devenir matador de toros en 1982 une alternative qu’il jugeait prématurée…. Il torera une bonne trentaine de novilladas piquées en dix ans de carrière avant de changer l’or pour l’argent, puis pour devenir l’apoderado de “Clemente” 

-“On à la même conception du toreo, c’est pour ça que depuis ses débuts je crois en lui, c’est un garçon qui a beaucoup de chose à transmettre devant les toros…” 

Autour de Fermin, on voit souvent un autre ancien banderillero, Christian Romero…

-“Il le suit depuis longtemps car il aime sa façon de toréer, mais il est là surtout par plaisir… Dans sa cuadrilla, il devrait y avoir Marco Leal et Gabin Rehabi, le reste serait des espagnols avec qui il a toréé…”

Aujourd’hui, avec Clemente, il est question de relancer sa carrière, du moins en France… Les conditions sanitaires sont loin d’être propice pour un déroulement normal d’une temporada et à fortiori pour émerger et s’imposer, mais en plus il a laissé quelques scories, tant ici que dans le Sud-ouest, qu’il lui faudra effacer… Nîmes, la novillada de la Cape d’Or et plus récemment le malentendu de Brocas…

-“Pour Brocas, il y a eu réellement un malentendu…. Nous avions été contactés par Marlène Fasolo pour participer à une fiesta campera qui devait se dérouler chez elle à la ganadería Malabat on s’est retrouvé aux arènes pour un festival taurin… Changement donc de type de spectacle que nous avons découvert le jour même à notre arrivée dans ce charmant village. On a donc décidé de ne pas y participer, pour cette unique raison et l’organisatrice l’a très bien comprit… D’autres non et nous ont tiré dessus à boulets rouges… Nîmes c’est totalement différent, Clément avait reçu un très violent choc avec perte de connaissance lors d’une novillada à Captieux quelques jours avant et malgré ce, il a tenu à honorer son contrat. Certes les deux novillos que le sorteo lui réserva, n’avaient pas grand-chose à offrir, mais ça ce n’est pas une excuse. En fait il fut absent tout au long de la matinée, étrangement absent… Pourquoi ? il avait résulté un très fort traumatisme crânien de sa voltereta tremenda de Captieux, ce que décela un médecin bordelais le lendemain de la Cape d’Or que Clément se décida de consulter au vu de son état général…. Donnez-lui simplement une opportunité et vous verrez un torero désireux de s’exprimer devant les toros et d’y triompher…”

Comme à Saint Sever ?

-“Au moins comme à Saint Sever”

Ojala !

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