Après son alternative en septembre 2023
Entretien réalisé par Thierry Ripoll (Toreria.net pour vuelta)
Solal est un prénom d’origine hébraïque. Il signifie « celui qui fraie son chemin« . Il faudra y rajouter « Matador de toros né le 17 décembre 2000 à Nîmes. Alternative : le 17 septembre 2023 à Nîmes, devant le toro “Candidato” n°12, negro bragado né en 08/2010 de 512 kg de Victoriano del Rio en présence de El Juli et Tomas Rufo. »
-Solal à 6 ans tu découvres la corrida, à 7, tu t’inscris au Centre Français de Tauromachie. D’où te sont venues ces passions si précoces pour le toro ? Avec qui as-tu fais tes premiers pas au CFT, tes professeurs, tes compañeros…
« Ma passion pour le toreo m’est venue par hasard. J’ai été impressionné et complètement happé par ce que j’avais vu en piste pour la première fois et je m’y suis intéressé. J’ai d’abord rejoint le CTN puis le CFT avec comme professeurs Christian Lesur, Gilles Raoux, Patrick Varin etc. Comme compañeros j’en ai eu pas mal mais les principaux et qui sont aujourd’hui toujours dans les toros sont Pierre Mailhan, Tibo Garcia, Rafi Raucoule, Tomas Ubeda et Nino Julien. »
Près de 20 ans plus tard, le petit “Solalito” est devenu Solal, le 73eme matador de toros français.
-Une première temporada avec six oreilles coupées en trois corridas seulement, dont une Porte des Consuls à Nîmes. L’as-tu imaginé et qu’as-tu ressenti en sortant par cette porte mythique ?
« C’est un moment de grand bonheur. Je pense que les efforts finissent toujours par payer et lorsque c’est le cas, j’essaye d’en profiter ! »
-Et cela, après la fin de l’engagement de Luisito à tes côtés, lui qui t’as conduit à l’alternative, tu t’es retrouvé à gérer toi-même ta carrière. Aujourd’hui qu’en est-il de la gestion de ta carrière ?
« C’est difficile, je ne peux pas le cacher. Difficile car il faut faire face à de nombreux comportements désagréables. Il faut arriver à avaler tout ça : les appels non pris, les non-réponses ou encore l’ignorance de la part de certains. Ce que je demande ce n’est que de toréer, de mettre le costume… »
-Au quotidien, où et avec qui partages tu les entraînements, les séances de toreo de salon ?
« Pendant plusieurs temporadas j’étais basé à Sanlúcar de Barrameda mais maintenant je suis revenu en France. Cependant j’aime repartir et faire des semaines ailleurs. Il m’arrive donc de retourner m’entraîner en Andalousie, à Madrid mais aussi dans le Sud-Ouest dans les Landes ou le Gers. Cette diversité de lieux me permet de voir de nombreux professionnels. »
-Et pour les faenas camperas, les tientas, indispensables pour « sentir le toro« , comment arrives tu à gérer ça aussi ?
« C’est sûrement le plus compliqué. Tous les toreros aiment toréer et c’est cela qui me fait souffrir le plus, de ne pas le faire assez. J’essaye de trouver des opportunités de tientas mais elles sont de plus en plus rares. Heureusement certains ganaderos et peñas taurinas arrivent à m’aider et grâce à eux je peux préparer mes courses en me mettant devant des cornes. »
Le dimanche 17 septembre 2023, c’est dans des arènes de Nîmes, pleines que s’est déroulé, à guichets fermés, la corrida de clôture de la Feria des Vendanges. Celle de ton alternative. Vêtu de blanc et or, tu as fait le paseillo encadré de son parrain de cérémonie, Julián López « El Juli », qui faisait ses adieux et de Tomás Rufo, venu remplacer Morante de la Puebla.
-Quels sont les souvenirs que tu gardes de cette journée exceptionnelle, celle de ton alternative ?
« Une journée magnifique. Pas parfaite mais inoubliable. J’en ai profité du petit-déjeuner jusqu’au verre de champagne, c’était la plus belle journée de ma carrière. Mais si je devais me rappeler d’une chose je dirais l’ambiance dans ces arènes. Toréer lors d’un no hay billetes chez soi, avec son public, ça en devient magique ! »
-Et après l’euphorie du moment, tu t’es retrouvé seul, professionnellement pour envisager ta première année de matador de toros. Une démarche nouvelle où tu as décroché trois engagements. Que reste-t-il de cette expérience ?
« Tout. Je pense que je me suis rendu compte, une fois de plus, de la cruelle réalité du milieu. Cette expérience me fait grandir. Je sens que je mûris comme torero et j’ai hâte d’en faire profiter les gens qui se déplaceront aux arènes. »
-Pour 2025, tu dois déjà avoir quelques touches, mais où, quand et comment, prépares tu cette saison ?
« Cette saison je vais la préparer comme la précédente. Je vais refaire un petit tour d’Espagne avant de démarrer. J’aime me retrouver là-bas pour m’entraîner. En attendant l’ouverture des annonces officielles des cartels du début de saison… »
En attendant l’ouverture des annonces officielles des cartels du début de saison, Retour sur une jeune carrière qui a séduit bon nombre d’aficionados.
Sa première novillada sans picadors date du 26 mars 2017 à Vauvert, en mano à mano avec El Rafi devant des erales de Turquay. En trois ans il va remporter le Bolsin de Bougue, le trophée Val d’Adour, les trophées Nimeño II et Sébastien Castella, trois fois le prix de l’U.C.T.P. Ricard Sud-est et une fois celui du Sud-ouest. Solalito sera finaliste de l’Alfarero de Plata de Villaseca de La Sagra et des nocturnes de Séville avant de débuter avec picadors le 14 septembre 2019 à Nîmes avec Fernando Plaza et El Rafi et des novillos de San Sebastián. Tout aller trop bien. Jusqu’à ce que le Covid s’en mêle.
-Comment as tu vécu, cette période très difficile, quasiment fauché en plein vol ?
« L’année et demie sans mettre le costume de lumière a été très très longue… C’était une drôle de situation mais pas que pour les toreros. Elle a touché vraiment tout le monde. Étonnamment elle m’a permis de me rendre compte qu’il existait un monde autre que les toros. »
Après dix mois d’arrêt, retour aux arènes en 2021 à Mugron, Beaucaire, Soustons ou il remporte la coupe France des novilleros, Istres, Tarascon, Saint Gilles, Nîmes, Parentis en Born…En 2022 Solal Calmet “Solalito” a fini sa temporada à Guadarrama, la troisième de l’autre côté des Pyrénées après Villaseca de la Sagra et Cadalso de los Vidrios. Et dix autres rendez-vous, Nîmes, où il remporte la 61eme Cape d’Or, Orthez où il triomphe des Miura, à Boujan, Soustons, Parentis, Brocas les Forges, Saint-Gilles… En 2023, il coupe trois oreilles à Aire sur l’Adour, se présente, le 7 mai à Madrid, enlève la Chaquetilla d’Or de St Gilles, le trophée Nimeño II à Tarascon avant Dax, Mauguio, Mont de Marsan, Hagetmau, Soustons, Béziers, Bayonne, Seissan, Arganda del Rey et puis Nîmes en septembre et son alternative…
-Deuxième phase de carrière, trois ans en novilladas piquées. Qu’est ce qu’il en restera dans ta mémoire personnelle ? Madrid ? Les triomphes en France ? Les novilladas en Espagne ?
« Durant ces trois années de formation j’ai accumulé beaucoup d’expérience. C’est sûrement la plus belle période de ma petite carrière. En toréant des novillos de ganaderias différentes dans de multiples arènes j’ai pu approfondir mon toreo et développer ma technique. Je pense que j’ai pris mon alternative en étant prêt et c’était le but. »
-Serge Almeras a été le premier à s’occuper de toi après le C.F.T. Ensuite ce fut Hervé Galtier avec l’aide de Denis Loré et enfin Luisito. Que t’ont-ils apporté chacun dans ces étapes de ta carrière. Et en prendre un aujourd’hui, que devra-t-il t’apporter ?
« Je pense qu’un apoderado est une aide précieuse. Je n’ai jamais été contre l’idée d’en avoir un, mais la situation a fait que je suis aujourd’hui seul. L’apoderado partage tout avec son torero et il doit être en adéquation. C’est un réel projet commun et une vraie relation de confiance. »
-Pour finir, que peut-on te souhaiter pour la temporada 2025 qui arrive ?
« Tout simplement de mettre le costume de lumières. Et alors là, je serai heureux. »