Noticias : entretien avec Borja Jimenez, révélation 2023 et finaliste de l’Oreille d’Or

Rencontre avec le torero d’Espartinas

Borja Jimenez-entrevue

Entretien réalisé par Thierry Ripoll (Toreria.net pour vuelta)

Borja Jimenez, la grande révélation de 2023, second du prestigieux trophée de « l’Oreille d’Or » decerné par Radio Nacional de España, repond à nos questions…

« Je suis convaincu qu’il était écrit que cette corrida changerait ma carrière, ma vie… »

Après un héroïque combat devant les Escolar Gil à Pamplona, il a mis debout la plaza de toros de Las Ventas de Madrid le 8 octobre dernier en coupant trois oreilles de poids aux toros de Victorino Martin. Rencontre avec le torero d’Espartinas.

…15 ans ont passés depuis sa première venue en France, à Arles avec son frère aîné, Javier, accompagné par son mentor, Antonio Ruiz Rodríguez, “Espartaco padre” et sa première sortie par la grande porte de l’amphithéâtre romain, porté par son père, avec trois oreilles dans son esporton…parmi les premières coupées lors de soixantaine de sans picadors qu’il toréa… Il prit l’alternative en 2015 une année après son frère, après avoir en l’an 2014 conquit la tres convoitée Porte du Prince de Séville… Et depuis, on l’avait un peu oublié…

– Un superbe parcours en non piquées, mieux encore avec les castoreños dont une dernière temporada exceptionnelle avec des triomphes à Arles, Pamplona, au Puerto de Santa María, et pour couronner le tout, une Puerta del Príncipe de Sevilla… Une alternative de luxe à Sevilla, le 5 avril 2015 avec Espartaco pour Parrain et José María Manzanares pour témoin et une première oreille coupée à un toro de Juan Pedro Domecq. Et derrière quasiment plus rien. Que c’est il passé pour en arriver là ?

« Au cours de ma carrière de novillero sans ou avec picadors, j’ai triomphé aussi bien en Espagne qu’en France dans des arènes importantes et gagné de nombreux trophées dans les ferias de novilladas. Après, il y a eu mon alternative, de grand luxe à Séville, le dimanche de Resurrección avec les maestros Espartaco et Manzanares ou j’ai pu couper une oreille.

Pendant mes deux premières années d’alternative, j’ai toréé un peu plus, mais ensuite il y a eu un bache de 6-7 ans, ce qui arrive à beaucoup de toreros qui viennent de prendre l’alternative. Dans mon cas, je ne pourrais pas vous dire pourquoi cette pause est survenue après avoir remporté des triomphes importants, probablement parce qu’il me manquait d’un peu de maturité et d’expérience pour pouvoir m’imposer dans les grands rendez-vous, avec les figuras.« 

-Pendant huit ans, un ou deux paseillos par temporada, l’an dernier trois, une a Sevilla et deux au Pérou -La Esperanza et Tacabamba… Comment vit on ces années de galère ? Et comment garder l’espoir, attendre son heure ?

« Il n’est pas facile de maintenir la flamme quand on ne toréait pratiquement jamais dans l’arène. Ce sont des années difficiles que j’ai vécues, basées sur les entraînements et les tentaderos. Grâce aux éleveurs, j’ai pu garder l’espoir de réussir, car ils m’ont toujours très bien traité et m’ont donné beaucoup de bêtes à tienter pour que je puisse continuer à me préparer aux corridas. »

-Début février de cette année, Julian Guerra accepte de gérer votre carrière. Il a ses entrées partout, mais c’est devant les toros quelles se gagnent. Qu’est ce qui a changé en Borja Jiménez pour qu’à partir de là tout fonctionne bien, voire très bien ?

« Julián est une personne clé dans ma carrière. Alors que d’autres apoderados ont rejeté ma proposition, lui a vu quelque chose de plus en moi et a parié sur ma carrière alors qu’il semblait presque impossible de sortir de la situation professionnelle dans laquelle je me trouvais. L’année entière de formation et de tentaderos que Julián et moi avons partagée a été fondamentale. Il m’a cerné à la perfection, comme torero et comme personne et a su faire ressortir la tauromachie que j’avais en moi grâce à de nombreuses heures de travail. Il m’a fait confiance et je lui ai fait confiance. Ensemble, nous avons réussi à redresser ma situation professionnelle. Je lui en serai toujours reconnaissant. »

-L’impact lors de la Copa Chenel, dont vous êtes finaliste, une confirmation à Madrid en avril qui attire l’attention, un retour plus que positif à Las Ventas devant les toros de Margé ou là de nouveau l’épée n’était pas au rendez-vous… et entre temps une corrida héroïque à Pamplona devant les Escolar Gil… Quatre mois ou un nouveau Borja Jiménez est perçu par les aficionados. Un sévillan qui s’impose devant des ganaderias toristas, un torero de Madrid ?

« Ça a été une saison capitale au cours de laquelle j’ai progressé à chaque corrida. La Copa Chenel a été très importante parce que les professionnels et les aficionados commencent à te remarquer. La corrida de Pamplona a été le tournant de cette année, grâce à elle des portes se sont ouvertes dans différentes arènes où j’ai pu triompher. Les trois courses à Madrid… la confirmation tant attendue après huit ans d’attente… avec la corrida de Margé j’ai commencé à connecter avec le public madrilène, j’ai fait une vuelta mais c’aurait pu être un plus grand triomphe… et le 8 octobre avec la corrida de Victorino a été la confirmation de toute l’année, le triomphe dont j’avais besoin pour m’ouvrir la voie. Madrid m’a mis sur le circuit. Et j’ai terminé la saison en triomphant au festival caritatif de Séville. C’est une année où j’ai tué plusieurs encastes et plusieurs d’entre elles ont été très dures y comprit dans des arènes de 1ere catégorie, j’ai tiré à pile ou face tous les après-midi et Dieu merci, c’est tombé du bon coté… « 

-Et puis vint la Feria de Otoño… On ne va pas à Madrid devant des Victorino sans y être préparé surtout pour une première devant ces toros… Comment l’avez-vous préparé ?

« Je me suis préparé très intensément pour pouvoir me donner à fond devant ces toros. J’ai eu la chance que Victorino m’invite à plusieurs reprises pour tienter et j’ai pu converser avec lui et avec Julián sur la façon d’attaquer ses toros et les nuances dans leur embestida en fonction de la façon dont on s’y prenait pour les toréer. C’est un élevage très complexe et exigeant, mais en même temps avec des charges d’une profondeur exceptionnelle. « 

-Roman est blessé par le premier Victorino Martin, vous devez du coup en combattre trois, qu’est ce qui s’est passé dans votre tête à ce moment là ?

« La première chose qui te vient à l’esprit c’est de t’inquiéter pour ton compagnon, savoir comment il va… Román avait subi une grosse cornada. Une fois que nous avons su qu’il ne pourrait pas sortir avec son prochain toro et qu’il me revenait, j’ai dû me rementaliser très rapidement. Mais je me reste convaincu que si l’après-midi s’est déroulé ainsi, c’était parce qu’il était écrit que cette corrida changerait ma carrière, ma vie. »

-Le résultat fut exceptionnel, trois oreilles de vérité qui conquirent Madrid… Comment peut on en arriver là en ayant si peux toréer pendant ces dernières années ?

« La base est la volonté de réussir, tout en restant dans la voie que je voulais suivre, et surtout de croire beaucoup en moi, alors que les années précédentes je n’avais presque pas de contrats et que je me préparais comme si j’allais combattre 50 à 60 corridas. En fin de compte, je dois la réussite de cette temporada à la persévérance dont j’ai fait preuve au cours des années précédentes. « 

-On avait l’impression que vous étiez prêt à donner votre vie pour triompher. Un engagement sans faille, en donnant l’avantage au toro, des séries vibrantes et efficaces… Quel torero est apparu cet après-midi là à Madrid ?

« Je me suis donné à fond tout l’après-midi pour chercher ma tauromachie et l’exprimer avec vérité, sincérité. Et le torero que je cherchais jour après jour dans les entraînements et dans les tentaderos est apparu. »

-Comment envisager l’avenir après ce coup d’éclat, et que vous a-t-il apporté mentalement ?

« La gestion des contrats à venir est gérée par mon apoderado. Moi je veux me concentrer sur ma préparation pour que lorsque vous me reverrez la saison prochaine, vous voyiez un Borja Jiménez encore meilleur que cette année. C’est mon obsession. Mentalement, cette saison m’a beaucoup aidé à me prouver qu’avec la foi en soi et beaucoup d’abnégation, on peut réaliser de grandes choses. »

-Le téléphone a du se remettre à sonner ? De grands rendez-vous parmi vos objectifs pour l’an prochain ?

« Dieu merci, le téléphone de Julian sonne à toute volée pour mon inclusion dans les cartels de l’an prochain. Ja Ja Ja… »

-Trois oreilles à Ecija un peu avant, un palco injuste à Zaragoza pour un torero qui s’est joué la vie devant de sérieux et exigeants Palha, un peu après… Comment Borja Jiménez va préparer sa temporada 2024

« Ce qui est passé est passé, pour demain, je m’y prépare avec un grand enthousiasme. Je continue le même mode de préparation que celui que j’ai suivi jusqu’à présent. Chaque jour, je cherche de plus en plus en moi à faire ressortir le torero que je veux que tous les aficionados voient. »

-Pour finir, je voudrais revenir aux tous débuts de votre histoire. Avez-vous, des antécédents taurins familiaux, si non, quels sont vos liens avec le maestro d’Espartinas comme vous, Juan Antonio Ruiz «Espartaco» et son torero de père pour qu’ils vous aident et vous soutiennent, vous et votre frère Javier depuis vos débuts ?

« Nous avons l’énorme chance d’être des amis de la famille Espartaco. C’est elle qui nous a appris, à mon frère Javier et à moi-même, les valeurs de la tauromachie. Nous avons eu la chance d’apprendre à toréer avec l’un des meilleurs maestros, pour nous le meilleur, Espartaco père. Il nous a appris ce que signifie la tauromachie, la dureté, le sacrifice, le respect du toro et de la profession. Tout quoi !« .

Rendez-vous en 2024 avec un torero que l’aficion veut redécouvrir…

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