Reportage campo : le changement de cap de la ganaderia de Pagès Mailhan

2020 restera une année très compliquée

Campo-Pages Mailhan

Reportage : Thierry Rippol (Toreria.net pour vuelta)

Pascal Mailhan est né camarguais au sein de la manade Fabre-Mailhan, élevage de taureaux camarguais, fondée en 1954, par Francis Fabre et Marcel Mailhan, son père.[

Philippe Pages est né dans l’Hérault en décembre 1954….Le 1er est un homme de taureaux (toros), le second est un homme d’affaire multicartes, passionné depuis toujours par la Camargue, ses chevaux et les taureaux, plutôt version « bravos »

C’est en cherchant l’un et l’autre un terrain pour y mettre leurs bêtes, qu’un marais faisant face aux Bernacles, les fit se rencontrer….

Ph. Pages envisageait de s’offrir une ganaderia en Espagne, ce qu’il fera quelques années plus tard en rachetant celle de Javier Molina et sa finca, tandis que Pascal lui évoqua l’idée d’en créer une, ici en France, avec les origines qui lui conviendraient…. Quelques mois plus tard, les deux hommes décidèrent d’unir leurs passions pour créer la ganaderia Pages-Mailhan…

Ce ne fut pas évident de faire admettre à Philippe que se lancer avec du Domecq serait une affaire plus compliqué que facile car avec cette encaste de garantie, soit ça fonctionne d’entrée, ce qui n’est pas évident en fonction des lots acquis et en changeant les bêtes de leur milieu d’origine, soit c’est un flop complet que l’on ne te pardonnera pas….(PM)

Leur choix s’est porté sur la ganaderia de César Chico, d’origine Manuel Arranz avec une autre pointe santacolomeña issue de l’élevage de sa femme « Alicia Chico », des Santa Coloma durs, plus pour la rue que pour l’arène…. En l’an 2000, 40 vaches et deux étalons, choisis librement par les nouveaux ganaderos ont débarqués sur les premiers cercados des Jasses de Bouchaud, aux portes d’Arles…. Une propriété qui s’agrandira au fil des saisons et qui verra pousser toutes les installations nécessaires à l’élevage du toro de combat dont la placita de tienta, y comprit les aménagements du hangar à tracteurs pour en faire une salle de réception….

Les premières sorties furent loin de nos espérances, tant et si bien qu’on acquit de vieilles vaches à Hubert Yonnet que l’on mit avec un semental de sang Domecq…. Au cas où….(PM)

La sélection fit vite ressortir le potentiel des « César Chico » et les résultats furent rapidement bien plus probants… La ganaderia trouvera ainsi ses repères et en 2010 « Fosforito », un grand novillo, remporta le prix de la concours de Vic Fezensac, l’année d’après « Señorito » doubla la mise…

Le premier était un Yonnet, le second un César Chico, prouvant qu’on était sur le bon chemin, mais on restait cantonné dans un créneau plutôt torista…(PM)

Il y a cinq ans, la décision fut prise de passer à autre chose, des toros de plus de catégorie afin d’assoir la ganaderia avec l’objectif de rentrer dans des arènes plus importantes, les faire combattre par des toreros de premiers plans…. Et depuis lors, peu à peu les sangs d’origines ont été éliminés. Les Yonnet sont partis chez Fano et les quelques survivants de César Chico sont chez Jean-François Piles qui se lance dans l’aventure dans le Sud-Ouest… Seuls restent aux Jasses de Bouchaud des erales que les éleveurs louent tout au long de la saison… ou qui auraient du être loué..

C’est un cap qu’il nous fallait passer mais sentimentalement j’y étais très attaché, ils représentaient mes tous premiers pas en tant que ganadero… Mais on ne pouvait pas indéfiniment se contenter de les faire lidier dans de petites arènes, même si elles sont plus que respectables…. (PhP)

C’est sur la finca Don Antonio, à Sando (Salamanca), que Julio García Hernández, grand aficionado al toro et homme d’affaire important, installa en 2008 sa propre ganaderia de pure origine Fuente Ymbro. C’est en avril 2019 qu’il fit combattre l’une des meilleures novilladas de la temporada madrilène, sinon la meilleure…. C’est de là que sont arrivés entre 2014 et 2015 les nouvelles bêtes qui portent désormais la devise « azur et blanc », soit la moitié de l’élevage de Julio Garcia…

Des vaches portent encore le fer de Fuente Ymbro, d’autre celui de Julio Garcia et bien sur, les dernières portent le notre…. Et nous venons tout juste de faire rentrer un nouvel étalon directement de Sando…(PM)

Il s’occupe de son harem, un lot de mères et leurs progénitures multicolores, un dernier vient à peine de naitre et cherche à se lever.. Deux autres lots d’une trentaine de têtes également occupent les prés avoisinants, les erales ont le leur et les becerras, une cinquante à tienter cette année aussi tandis que les novillos, deux lots et les toros, dont la corrida de Tyrosse attendent de savoir ce qu’ils vont devenir…

C’était notre première corrida de toros de ce sang. Mais il se pourrait que tout espoir ne soit pas éteint. Un devait aller à Mauguio, un à Aignan et un doit être combattu à Saint Martin de Crau…. Deux novilladas étaient retenues pour des arènes de 1ere en France…. Un novillo pour Arles et un pour Millas. Pour ce dernier c’est définitivement annulé On devrait difficilement s’en remettre, 2020 restera une année très compliqué même si le fait d’avoir beaucoup d’herbage nous facilitera les choses par rapport à certains de nos collègues… (PM)

350 bêtes environ se partagent les 400 ha du domaine mais les males à lidier cette année vont pour la plupart y rester, engendrant des problèmes supplémentaires…

On va vers une année quasiment blanche pour le coté arènes et en plus on louait pas mal d’erales pour de petits festejos, on avait pas mal de fiestas camperas retenus… On n’est pas les plus impactés et Pascal peut compter sur mon soutien total en cette période délicate…(PhP)

Une première novillada satisfaisante à Nîmes en 2018, rehaussé surtout par le sixième bis qui laissa ses deux oreilles à El Rafi et qui fut crédité d’une vuelta posthume….

A Nîmes on a eu la confirmation que dans les lots de Fuente Ymbro, il y a des bêtes qui ont de la noblesse mais qui finissent vite en tablas, les toreros ça ne les dérange pas, comme Perera à Palavas qui triompha après de très longs enchainements très près des barrières…. Moi je préfère le toro qui dure et qui combat au centre de la piste et toute la lignée qui avait cette tendance aux tablas a pratiquement été éliminée en tienta…. Pour revenir à cette novillada de Nîmes, ce fut un peu à pile ou face, quand Simon Casas nous à appelé…. Philippe s’est dit il faut y aller et avec un peu de chance c’est bien passé….(PM)

De là des portes se sont entrouvertes que la Covid19 a aussitôt refermé…

Les gens oublient vite comme les empresas d’ailleurs et pour nous, l’engouement suscité par nos sorties de 2018 et 2019 risque de passer aux oubliettes. Je crains que de ce coté là on doive quasiment repartir à zero…. 2021 sera une nouvelle année et l’on espère reprendre le bon sens de la marche… (PhP)

Dans le cadre des Feria del Campo, le 5 juillet prochain aux Jasses de Bouchaud ont affiche complet depuis déjà longtemps

J’ai était surpris par cet élan de solidarité. Il y a même des aficionados qui ne me connaissent que du coté Course Camarguaise qui seront là….(PM)

Mr Pages cette situation pandémique a du avoir aussi ses conséquences particulières sur l’élevage que vous possédez avec R. Margé dans la Sierra de Constantina (Sevilla)

C’est encore plus compliqué qu’ici. Tout ce qui avait été vendu du fer d’Ave Maria nous reste sur les bras et à ce jour, sans espoir de reprise. Et comme on est tres nombreux dans cette situation, on n’attend pas après vous…. Comme pour ici il faut courber l’échine et considérer ça comme une année de perdu… (PhP)

L’horizon semble s’éclaircir un peu pour le monde des toros de ce coté là, reste le coté sociétal de la tauromachie qui est mis à mal un peu partout dans le monde…. En restant solidaire et en conservant la vérité et le sérieux de la corrida avec des élevages qui maintiennent la bravoure et la caste, la fiesta brava peut encore passer par-dessus cette forte vague…

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